KAOS de Paolo & Vittorio Taviani (1984)
Synopsis
Le film est en quatre épisodes et un épilogue : L'autre fils raconte la haine d'une mère pour son fils, qui est la réincarnation de l'homme qui l'a violée. Le Mal de lune montres les efforts d'une femme pour aider son paysan de mari à ne pas se transformer en loup-garou lors de la pleine lune. La jarre raconte les déboires d'un ouvrier embauché pour réparer une jarre géante, et piégé à l'intérieur. Requiem dépeint la lutte de paysans contre des fonctionnaires pour qu'ils puissent enterrer leur patriarche où ils veulent. Enfin, dans Entretien avec la mère, Pirandello parle avec le fantôme de sa mère d'une histoire qu'il a voulu écrire, mais qu'il n'a pas pu faire, faute de trouver les mots.
On r’fait le film
Paolo & Vittorio Taviani : « La mère est le passé sur lequel nous devons construire notre avenir ». La mère… la terre-mère et ses paysages siciliens qui se nourrissent de sécheresse, proche de l’image d’un désert. Les frères Taviani affectionnent particulièrement ce réalisme minimaliste et aride qui colle parfaitement au monde profondément rural qu’ils veulent dépeindre. Les frères Taviani, les pieds bien ancrés dans la terre, la tête dans le ciel, vont trouver chez Pirandello du grain à moudre pour leur moulin. Pirandello, le sicilien et auteur de nouvelles qui pénètrent les âmes et la terre de cette région du sud de l’Italie dont les réalisateurs sont tombés éperdument amoureux. Ils partagent avec lui la compassion en même temps que l’admiration pour ce peuple issu d’une surface austère. Pirandello, l’enfant du chaos et d’un espace primitif proche de l’origine du monde qui ne semble que désolation à première vue, permet aux réalisateurs de jouer sur les contrastes de la vie comme l’indique Vittorio Taviani : « La vie vaut la peine d’être vécue. Elle est parfois dure mais on finit par l’aimer ». Du matériel de base offert par Pirandello, plutôt obscur et désenchanté, les frères Taviani vont retirer de la lumière créatrice. Entre désespoir et espoir, « Kaos » parcourt le chemin qui mène de la vie à la mort à travers ces mythes siciliens réincarnés dans l’esprit de Pirandello, puis dans ceux des frères Taviani.
Chaque séquence va jouer le thème de « La terre-mère », à sa manière et de façon indépendante. Les frères Taviani vont unifier ces séquences par l’intermédiaire de l’image d’un corbeau auquel des paysans vont attacher une clochette autour du cou. Il représente l’oiseau de mauvais augure mais en même temps son envol permet d’observer les événements du dessus, avec distance. Son apparition, ainsi que le bruit de la clochette nous invite à chaque fois, à entrer dans une nouvelle facette du thème récurrent. Le découpage est limpide, clair comme de l’eau roche, même si toutes les séquences n’offrent pas la même intensité dramatique. Plus que de simples réalisateurs, les frères Taviani sont des poètes de l’image. Pirandello les a nourris en profondeur et en retour, ils lui ont offert une magnifique représentation cinématographique pour leur amour commun de la terre sicilienne. Chez les frères Taviani, le chaos rime avec enchantement.
Sous la loupe et pour le plaisir : La terre-mère illustrée
La terre-mère et sa nature dominée par la main de l'homme
La terre-mère qui engendre la vie
La terre-mère qui surplombe les hommes de toutes ses forces
La terre-mère en voie de civilisation
La terre-mère et ses paysages arides
La terre-mère et son équivalence humaine
La terre-mère et sa nature contrastée